Concours de nouvelles : les auteurs amateurs et leurs chéquiers

Puisque j’ai pas mal parlé concours lundi, étendons-nous un peu sur le sujet.

Quiconque écrit des textes originaux est généralement au courant que sont organisés en permanence toute une tripotée de concours littéraires pour amateurs de tous horizons. Tous les trois mois, j’écris un article pour le journal de la Plume d’Argent visant à mettre en lumière quelques-unes de ces compétitions qui seraient susceptibles d’intéresser les membres de notre communauté d’écriture.

Et laissez-moi vous dire que lorsque je fais mon tri, j’en vois des vertes et des pas mûres !

Un concours, c’est quoi ?

J’ai inscrit « concours de nouvelles » dans le titre de cet article, mais pour être plus précise, je parle ici de tous les types de concours pour amateurs. Bien que ceux portant sur les nouvelles soient les plus fréquents, on trouve aussi des concours de poésie, et même de romans.

Tous ces évènements peuvent être organisés par des maisons d’éditions, des bibliothèques, des mairies, des associations littéraires, mais aussi des hôpitaux, des offices du tourisme, des associations caritatives, la SNCF, le boucher du quartier… Bon, peut-être pas le boucher du quartier ; en tout cas je n’ai pas encore vu le cas de figure, mais ça ne m’étonnerait pas outre mesure si cela arrivait.

Premier indice, donc : n’importe qui peut organiser un concours. Vraiment n’importe qui.

Gagner un concours = la gloire éternelle ?

Euh, non. Gagner un concours organisé par la maison de retraite de votre grand-mère ne vous apportera pas une horde de fans en délire, et ne poussera pas non plus Gallimard et Flammarion à se jeter à vos pieds. Si vous avez de la chance, votre nom sera diffusé dans le journal local ou sur le site Internet des organisateurs.

Certains concours se proposent de publier un recueil des meilleures nouvelles ou poésies reçues, mais attention : ce sera souvent sans droits d’auteur pour les participants, et à diffusion très limitée.

À quoi faire attention quand on veut participer à un concours ?

Déjà, à votre argent.

Hé oui, ça semble horriblement prosaïque et matérialiste, dit comme ça. Mais pourquoi donc croyez-vous que tant de gens créent des concours en veux-tu en voilà ? Par amour de la littérature ?

Bon, c’est le cas pour certains d’entre eux. Mais pour les autres, le secret est ailleurs : c’est que ça rapporte, tout simplement !

C’est un principe bien connu des maisons d’édition à compte d’auteur crapuleuses, des maisons « alternatives » du web aux frais cachés et des organisateurs de concours : les auteurs amateurs, ça paie. Ce sont souvent des gens assez aisés, décidés à percer dans le milieu ou bien persuadés qu’ils sont le prochain Molière, et ils sont prêts à mettre la main à la poche pour que leur talent soit reconnu. Trop souvent.

Alors que surveiller quand vous repérez un concours qui vous semble intéressant ?

  • Premièrement, les frais d’inscription (ou de dossier, ou de participation), généralement à payer par chèque. Il existe heureusement pas mal de concours gratuits ; mais pour les autres, il faut débourser de 2€ jusqu’à 12€ (12 !) ou plus pour espérer soumettre son œuvre à un jury. Selon la longueur maximale du texte accepté, ça peut commencer à faire très cher la page. À noter que je cite ici seulement les montants que j’ai vu pour les concours de nouvelles et de poésies. Pour les concours de romans, ça peut aller taper bien plus haut…
  • Ensuite, les modalités d’envoi. On pourrait croire que les « frais de participation » seraient destinés à couvrir le coût des photocopies pour le jury, mais ce serait naïf. Non, ne soyez pas étonnés si, en plus de votre joli chèque, on vous demande d’envoyer votre œuvre par courrier en plusieurs exemplaires — généralement, de 2 à 7 copies. En plus du papier et de l’encre pour l’impression, vous allez vite devoir aller au-delà du timbre basique, parce que votre enveloppe ne sera pas spécialement légère.
  • Le nombre de prix décernés. Imaginez que vous tombiez sur un concours dont le premier prix est de 1000€. Jackpot ! pensez-vous. Sauf qu’un concours de ce type aura forcément des frais d’inscription, sans doute élevés, et que s’il n’y a qu’un seul prix remis, alors tous les participants sauf un auront payé sans rien recevoir en retour. Vous pouvez aussi jouer au loto, c’est plus rapide. Mon conseil serait de privilégier un concours avec plusieurs prix, même s’ils sont moins alléchants.
  • La remise des prix. On n’y pense pas forcément, mais certains organisateurs peuvent vous demander d’être impérativement présent lors de la cérémonie de clôture de l’évènement pour recevoir votre prix. S’il s’agit d’un concours organisé à proximité de chez vous, pas de problème. Autrement, souciez-vous de savoir si les organisateurs financent le transport ou l’hébergement (cela peut arriver, mais c’est rare), ou si le prix remporté compense vos frais.
  • Enfin, le prix lui-même ! On pourrait se dire que c’est la meilleure partie de toute l’affaire, mais méfiance. Comme je le disais plus haut, certains concours prévoient la publication d’un recueil des meilleures participations, soit en tant que prix principal, soit en supplément d’un prix monétaire ou en nature.
    D’abord, sachez si les auteurs recevront des droits d’auteur sur ses ventes. Si ce n’est pas le cas, vérifiez combien de participations y seront regroupées : si les 15 meilleures nouvelles sont publiées mais que seuls 3 prix sont décernés, cela veut dire que 12 personnes verront leur œuvre publiée sans aucune compensation financière. Enfin, s’il est prévu que les gagnants reçoivent, disons, 50 exemplaires du recueil en question… Demandez-vous ce que vous en feriez.

Voilà pour mes principaux conseils. À voir une liste pareille, on pourrait se dire que mieux vaut ne carrément pas mettre le nez dans l’engrenage, mais il y a tout de même des concours très sympas qui circulent sur la toile ou près de chez vous. La preuve, j’arrive quand même à écrire mon article pour le journal quatre fois par an. 😉 Le tout est d’être prudent et de se renseigner !

D’ailleurs, avez-vous déjà participé à des concours ? Si oui, comment cela s’est-il passé ? Si non, envisageriez-vous un jour de le faire ?

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9 commentaires


  1. Je dois être très naïve (et je ne m’étais peut-être pas intéressée plus que ça à l’ensemble des concours organisés) mais je n’imaginais pas qu’on pouvait demander des frais d’inscription pour participer à un concours d’écriture. Et en même temps, maintenant que j’y pense, un concours sportifs, ça me paraitrait normal. Mais je sais pas pour l’écriture, ça me dérange en fait! Idem, qu’on te demande d’envoyer des versions papiers à l’heure du numérique, ça me fait quand même halluciner.

    Sinon, pour ma part, j’ai participé à un seul concours pour le fun organisé par We love word pour HQN, et j’ai eu la chance de voir ma nouvelle prise. Donc, forcement, j’en ai un très bon souvenir. Dans l’ensemble, les concours dont j’ai entendu parler (en fait, des appels à texte plus que des concours, mais la différence entre les deux est quand même fort subtil au final) et pour lesquels des connaissances ont participé, j’ai une vision plutôt positive de la chose, puisqu’il n’y avait aucun des mauvais côtés (ou pièges) que tu cites dans ton article.

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    1. Hé oui, comme je le disais, n’importe qui organise des concours. Et beaucoup ne voudraient pas prendre de risques financiers… Financer les prix, imprimer et envoyer à ses frais les copies de chaque texte au jury… C’est souvent trop leur demander. Mais bon, j’en ai récemment vu un organisé par Emmaüs, par exemple. Là, la récolte manifeste de fonds est déjà plus acceptable. 😉

      Quant aux appels à texte, c’est vrai qu’il est parfois difficile de les différencier des concours, et beaucoup appellent « concours » ce que j’appellerai « AT ». Pour moi, un AT ne demandera jamais de frais de participation, l’envoi se fait très souvent par email, et le seul prix est la publication à compte d’éditeur. Selon cette définition, on risque en effet beaucoup moins l’arnaque ! Évidemment, il en existe moins que de concours basiques. Mais je suis heureuse que ce se soit toujours bien passé pour toi et tes connaissances !

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  2. Je n’ai participé qu’une fois à un concours payant avec nouvelle à imprimer sept fois… et je n’ai pas été retenu. Ça m’a vacciné. En plus, beaucoup de concours sont organisés par « la mairie de Trouperdu », « l’amical de l’écrivain de la ville de Coinpaumé » et consors. Et dans ces cas-là, qu’il faille payer ou non, imprimer ou non, c’est très bizarrement toujours des gens du cru, de la ville ou de la région voisine qui se retrouvent lauréats. Je préfère donc me concentrer sur les ATs de fanzines ou d’anthologistes connus et reconnus qui sont, en général, plus professionnels.

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    1. Ha ! Oui, l’impression en sept exemplaires, ça fait mal. J’ai moi-même participé une fois à un concours local, et je crois que je ne le referai pas (5 exemplaires + frais de 8€… c’est bien parce que c’était ma ville). J’en diffuse quand même quelques-uns, quand ils ont l’air bien fichus, mais il faut faire le tri. Je comprends ton choix.

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  3. Je tombe des nues, aussi : je n’étais pas du tout au courant que ça existait ce type de concours.

    Comme quoi, avant tout AT ou concours, il faut toujours bien lire les règlements et les petites lignes. ^^

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    1. C’est tout à fait ça, toujours se méfier ! C’est malheureusement trop facile d’être pris pour un pigeon quand on écrit (il faut croire qu’ils nous imaginent tous comme de doux rêveurs…).

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  4. Bonjour, je comprends ton envie de préserver les auteurs en herbe de dérives qui existent certainement, mais je ne suis pas totalement d’accord avec toi. La critique des frais de participation, par exemple. Lorsque j’étais adolescent je pratiquais le judo dans un club de campagne et je faisais des compétions. Pour avoir le droit d’y accéder mes parents ont dû payer un passeport sportif qui devait valoir dans les 50 francs (oui ça date) à l’époque et un droit d’inscription pour chaque compétitions. Sans parler de l’essence à mettre dans la voiture pour m’amener combattre, parfois à 50 kilomètres de la maison. Pourtant, le seul prix à gagner était une coupe ou une médaille en toc. Cette pratique n’a jamais choqué personne et c’est encore comme ça aujourd’hui dans le milieu du sport amateur. Aujourd’hui je débourse entre 5 et 15 € quand je participe à une course, en plus du prix de ma licence, là encore sans espérer autre chose en retour que le plaisir du dépassement de soi. Est-ce que les organisateurs gagnent de l’argent dans l’histoire ? Oui évidemment. Est-ce que c’est profiter des sportifs ? Je ne pense pas. Organiser un événement demande du travail et tout travail mérite salaire.

    Pour ce qui est du cas des concours d’écriture, je ne les aborde pas forcément comme une opportunité de gloire éternelle. De toute façon le talent d’un auteur a peu à voir avec ses chances de connaître le succès aujourd’hui. J’y vois plutôt un challenge personnel. Si je gagne quelque chose, tant mieux, sinon il reste toujours le plaisir du dépassement. Pour ce qui est de l’éventualité que mon texte soit publié sans compensation financière, il est de toute façon très rare que les recueils de nouvelles de concours génèrent des profits financiers colossaux. Je pense donc que le plus important c’est l’état d’esprit dans lequel on aborde les choses. Ce qui crée les grandes frustrations, ce sont souvent les attentes irréalistes, bien plus que la malhonnêteté des acteurs d’un milieu. Bien entendu, ce point de vue n’engage que moi.

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    1. Bonjour,

      Haha, tu déterres un vieil article. Je ne me souvenais même plus de son existence. Tu n’as pas tort, bien sûr : la pratique des frais de participation est courante dans les concours amateurs de tous bords. Mon but était surtout d’encourager les auteurs/autrices à adopter un regard critique, parce que pour avoir vu passer *beaucoup* de concours à l’époque où je rédigeais cette chronique sur Plume d’Argent, certains étaient clairement abusifs. D’autant qu’on peut quand même s’attendre à ce que l’organisation d’un concours de nouvelles engendre moins de frais qu’une compétition sportive, pour laquelle il faut réserver les locaux etc.

      Quand c’est une association qui organise ça et en profite à la fois pour faire un coup de com’ et récolter quelques fonds, évidemment, c’est une chose. Mais c’est plus gênant quand c’est une entreprise, ou carrément une maison d’édition qui entend imprimer un recueil à moindres frais sur le dos d’amateurs peu au fait de leurs droits.

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  5. Hello !
    Je participe régulièrement à des concours de nouvelles, et j’avoue que ce que je trouve le plus frustrant, c’est que, lorsque vous ne gagnez pas, vous n’avez (dans la grande majorité des cas) absolument aucune nouvelle des organisateurs. Même pas un petit mail en mode « malgré la qualité de votre texte,… » ou « merci d’avoir participé ». Et ça, ça me dégoûte, car à l’heure du numérique, et même si les organisateurs sont une petite structure style librairie ou club de lecteurs, ce n’est quand même pas compliqué d’envoyer un mail aux participants recalés !

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